Mike Leigh réalise avec Mr Turner un fastidieux tableau impressionniste. Le réalisateur s’attaque aux vingt-cinq dernières années de ce célèbre peintre britannique. Membre de la très fameuse Royal Academy of Arts, Turner est un artiste reconnu et controversé. Ses innovations artistiques lui valent de nombreuses critiques de la part de l’Establishment et de la société anglaise de l’époque. Il vit reclus chez lui en compagnie de son père et de sa servante. Ses nombreux voyages lui permettent de nourrir son inspiration. Il y rencontre Madame Booth, avec qui il finira la fin de sa vie.
On découvre ainsi pendant près de deux heures et demie, le parcours de ce peintre acariâtre en quête d’absolu, incarné ici par l’imposant Timothy Spall, qui a reçu le prix d’interprétation masculine à Cannes. Réaliser un biopic n’est pas une chose facile. Et si l’esthétique et la photographie du film demeurent irréprochables, le réalisateur nous dresse un portrait cru qui nous en apprend bien peu sur cet homme qu’on voit moins peindre et créer que geindre et grogner. Certaines scènes, presque dérangeantes, nous en font parfois oublier que Turner est un artiste.
Toutefois on apprécie à le retrouver devant ses tableaux, l’acteur transfigure alors l’écran. Cette illumination créatrice nous plonge au cœur même de l’expérience picturale. Ses gestes fous, ses coups de pinceaux intempestifs, ses aplats de peinture blanche et jaune, ses crachats qu’il applique soigneusement sur la toile nous font redécouvrir de manière inattendue les plus grands chefs d’œuvres de ce maître incontesté de la lumière. Le film n’est malheureusement pas à la hauteur de cet artiste inspirant et le moins que l’on puisse dire c’est que le réalisateur, lui, ne nous éblouit pas de sa lumière.
Raphaël Halbout