Dans son Histoire de la peinture en Italie, Stendhal écrit : « Je l’aime trop pour en juger ». Avec Le Moulin Rouge!, (2001) c’est la même chose : je l’aime trop pour en juger. Dans une comédie musicale haute en couleur, Baz Luhrmann raconte l’histoire d’amour entre Christian, un jeune poète anglais, et Satine, prostituée et star vedette du célèbre bordel. Et c’est indispensable. Cet article ne vise donc pas une critique objective ou une analyse poussée de la mise en scène, non. Cet article explique tout simplement à qui voudra bien le lire, pourquoi j’aime ce film. Voici donc une liste non exhaustive des raisons pour lesquelles je suis amoureuse de ce film : un top 5 déguisé je suppose.
1). Parlons musique, parlons reprises : une comédie musicale déjantée
Tout y passe : David Bowie, The Police, Madonna et même Maryline Monroe. Les plus grands donc. Chaque chanson est retravaillée à tel point qu’elles semblent avoir été écrites spécialement pour le film.
2). Du rouge, du rouge, du rouge ! : un décor de théâtre ou de cinéma ?
Un des enjeux du film est la transformation du Moulin rouge – un bordel – en salle de théâtre. L’espace du film lui-même se construit comme un mini-théâtre. Baz Luhrmann ne cache d’ailleurs pas la mise en abyme puisque le film commence par un levé de rideaux rouges. Au-delà du théâtre, le film rend un hommage poétique et magique à la ville de Paris reconstruite en maquette. Les personnages dansent sur les toits de Montmartre et près d’une tour Eiffel miniaturisée sous une pluie d’étoile. Le film reconstruit totalement l’espace de la ville et du bordel : le spectateur entre dans un monde coloré et purement cinématographique.
3). C’est un anglais et un nain déguisé en none… : un humour rythmé
La première partie du film est extrêmement drôle. Tout est totalement absurde : Christian rencontre Toulouse car un argentin narcoleptique traverse le plafond de sa chambre d’hôtel. Satine confond Christian et le Duc ce qui donne lieu à un quiproquo hilarant. Même les reprises sont teintées d’humour comme celle de Like a Virgin (Madonna).
4). « I will always love you » … or maybe not : une vision pessimiste de l’amour ?
Certains diront que Le Moulin rouge ! n’est qu’une comédie romantique à l’eau de rose, si ce n’est « un film cul-cul » pour paraphraser les plus réfractaire. Détrompez-vous. Si on regarde de plus près, Le Moulin rouge ! présente une vision assez sombre et complexe de l’amour et de la relation amoureuse. Première question : est-ce réellement une histoire d’amour ? D’un amour véritable ? Christian tombe amoureux de Satine car il est persuadé qu’elle l’aime. Il tombe alors amoureux de l’amour mais pas de Satine. Peut-être que le film essaye de nous dire que l’on ne tombe jamais amoureux de l’autre pour ce qu’il est, mais toujours pour ce qu’il peut nous apporter. Tomber amoureux serait le fait de l’amour propre : la sensation d’être aimé est ce qui est aimable. L’ambiguïté d’une vision pessimiste ou optimiste de l’amour qui parcourt le film, permet au spectateur de s’interroger voire de décider quelle vision de l’amour lui convient le mieux.
5). « You don’t have to sell your body to the night » : le monde de la prostitution.
Le film ne le cache pas, le moulin rouge est un bordel et Satine est une prostituée. Même si c’est un monde qui peut sembler édulcoré par le décor et les costumes, la violente réalité fait surface. Satine est traitée comme un objet par la majorité des personnages masculins et le Duc particulièrement : Baz Luhrmann va jusqu’à mettre en scène un viol. Satin est considérée comme une femme objet et est emprisonnée dans le monde des « bas-fonds » comme le montre l’oiseau en cage au début du film. Elle espère une libération par le théâtre, mais sa seule réelle émancipation est son histoire d’amour avec Christian. Satine devient l’archétype d’une héroïne au destin tragique.
Le Moulin rouge ! est donc un film plus complexe qu’il n’y paraît. Sous un décor édulcoré, c’est une vision du monde assez pessimiste qui s’offre à nous. Cela peut faire rire les plus sceptiques mais la devise du film « the greatest thing you’ll ever learn is just to love and be loved in return », emprunté à David Bowie dans Nature Boy, n’est pas niaise : c’est peut-être justement ce qui nous éclaire un peu dans l’obscurité apparente du monde.