Trente ans après sa folle trilogie, Dr George Miller retourne en psychanalyse pour faire son check-up traditionnel. Le résultat : Un road movie à vous couper le souffle avec un Tom Hardy (Mad Max) à la limite du sauvage, dirigé par une ex-mannequin manchot indomptable (Imperator Furiosa), et entouré de splendides créatures toutes de blancs vêtues. Sacré Miller, son génie n’a pas pris une ride.… Pour les « incultes », Mad Max traite de la folie des hommes dans un univers post-apocalyptique. Chacun se bat pour l’essence, facteur de survie primordial, car si tu n’es pas en mouvement constant dans ce monde, tu meurs. Voici un bref topo de cette trilogie à trois vitesses, dans laquelle le monde n’a cessé de devenir de plus en plus tordu et surprenant.
Un graphisme renaissant : le retour d’un futur apocalyptique à l’ancrage punk et destroy.
Enfin un film où tout n’est pas transparence. L’univers de Mad Max, à la fois asymétrique et déstructuré, s’empreigne toujours plus de la folie des hommes.
Il ne faut pas vous en soucier, nul besoin de regarder les anciens pour comprendre le scénario. Mad Max : Fury Road capitalise sur le spectacle et le pari est réussi. Jamais un road movie de deux heures d’actions non-stop avait réussi à autant nous captiver. Le réalisme des cascades nous projette directement dans le désert de Namibie post-apocalyptique, en bref, ce Mad Max transpire un mélange de poussière et de fumée endiablée de V8.
Mais Mad Max : Fury Road, vu par le Celsa, c’est quoi ?
Même si on s’obstine à dire que dans Mad Max le scénario n’est qu’un détail, Georges Miller exploite des références à la fois philosophiques et mythologiques tout au long de ses films. Grâce à nous, vous allez enfin pouvoir lire entre les images, ne nous remerciez pas, on vous mache les travail.
Un dictateur résolument foucaldien – Dans le monde dévasté de Mad Max gît une citadelle remplit de « war boy », hommes blancs comme neige, gavés par le lait des mères et aussi fou que dévoué envers leur guide Immortan Joe. Cette société privée du moindre repère moral met en scène les élites contrôlant le bas peuple, assoiffé et affamé.
Immortan Joe, du haut de sa citadelle panoptique, voit tout. Ce schéma classique du cinéma nous rappellerait presque la pyramide arrogante du créateur des « Replicants » de Blade Runner ou tout aussi bien la domination de Sauron sur le Mordor (Le meilleur dispositif panoptique pensé de nos jours !) En ayant la main mise sur l’eau, Immortan discipline les hommes et agit sur leur conscience. Un véritable exercice de production de la vérité. « Ne vous habituez pas trop à l’eau, ou vous sentirez les terribles conséquences du manque ». En rendant l’individu calculable, Immortan Joe initie un rapport de domination qui influence l’engagement des individus vers des jeux de vérité. Ici les disciples fonctionnent comme des techniques fabriquant des individus utiles, avec un rôle précis. Les « Wars Boys » sont prêt à donner leur vie au nom du V8, Nickel et chromé pour rejoindre les plaines de Valhalla. Qu’importe la mort, s’écrie le jeune Nux : « I live, I die. I LIVE AGAIN. ».
Le mythe du voyage, en route vers l’Eldorado – La quadrulogie Mad Max peut aisément se comparer aux grands classiques mythologiques du voyage, à cela près que ce sont les différents peuple qui rêvent du paradis perdu tandis que notre héros, Max fuit toute réalité, afin de se préserver de la folie et de survivre. Car dans tout voyage il y a une dimension mythique, on rêve avant le départ, on s’imagine des rencontres, on s’invente un idéal. C’est un voyage de l’esprit dans des univers que nous inventons. Et c’est là que se situe le fil conducteur du film. Furioza guide le convoi vers son « Eldorado » qui hante ses plus vieux souvenir. Un lieu où la vie, l’eau et la nature règnent en abondance. Ce mythe du voyage nourrit les protagonistes et les incitent à créer et ouvrir continuellement de nouvelles perspectives, d’où les innombrables péripéties de ce road movie de deux heures.
Mais outre les divers rebondissements du film, le second symbole permettant à Mad Max d’atteindre le seuil mythique du voyage est le véhicule. Il est impensable de penser voyage au 21ème siècle sans moyen de locomotion, et Georges Miller effectue un travail méthodique dans le choix de ses véhicules. Ils sont le spectacle du film, dignes représentant de la folie des hommes et de leurs croyances. Rouler sur la terrifiante « Fury Road » permet aux War Boys d’Immortan Joe de comparer la symbolique du voyage à un rite de passage entre le monde réel et les plaines de Valhalla.
La femme au centre de ce monde de fou – Dr Miller a réalisé une performance dans le milieu Hollywoodien, en mettant à l’honneur Charlize Theron comme l’héroïne principale du film. Une prestation épatante, qui prouve à nos traditionnels macho, que les femmes sont tout aussi talentueuse et folle que les hommes. Mais un élément dénote dans ce pari risqué et Aaron Clarey , blogger américain, l’a bien remarqué. Dans le film, Max ne contrôle pas la situation, il écoute, et agit pour l’Imperator Furiosa. Hors comme le dit si bien Clarey : « Personne n’aboie d’ordres à Max ». Un paradoxe étonnant pour un film qui s’appelle Mad Max et où le héros n’est en fait qu’un personnage secondaire dans une guerre qui le dépasse complètement.
Problème majeur pour assurer le succès du film? Au contraire! Mad Max reste malheureusement peu connu des jeunes, jugé violent par certains, idiot, ringard et sans fin par d’autres. George Miller a su redonner un coup de boost à son épatante histoire. Et même si le Max de 2015 est encore plus Mad que celui de 1985, il est entré dans l’ère du temps sans aucun problème, et pour ça, merci Charlize. Mais malgré un jeu impressionnant de Tom Hardy, qui est assurément le Mad Max de la situation, j’espère retrouver dans les prochains épisodes, un « Max » de testostérone.
À plus sur les plaines de Valhalla,
Bruno ZOBEC Aka Han Solo