Parue en 2014 au Japon, Ronya, fille de brigand est une adaptation d’un livre pour enfants d’Astrid Lindgren, créée par le studio japonais d’animation 3D Polygon Pictures (qui a notamment produit la série Star Wars: The Clone Wars) et coproduit avec le légendaire Studio Ghibli (Le Voyage de Chihiro, Mon voisin Totoro, Princesse Mononoke – dois-je en dire plus ?). Grâce à un accord avec Amazon en 2016, elle débarque enfin en Occident, portée par, entre autres, la voix de Gillian Anderson (The X-Files). C’est l’histoire de la fille unique d’un brigand en Scandinavie médiévale, qui apprend peu à peu à vivre seule dans la forêt, en découvrant les créatures magiques qui y habitent mais surtout un ami – un garçon de son âge -, le fils du chef du clan rival de celui de son père.
Au premier abord, l’idée paraît presque parfaite : Lindgren, Miyazaki, Ghibli, et séries – rien que ces quatre mots côte-à-côte suffisent pour nous faire trépigner d’impatience. Pippi longues chaussettes et Karlsson sur le toit d’Astrid Lindgren étant les deux premiers livres que j’ai lus (et adorés) à l’âge de 8 ans, et n’ayant pas relu l’auteur suédoise depuis, j’ai maintenant hâte de voir comment l’un de ses romans se voit accorder une vie nouvelle avec Studio Ghibli. Le nom de Ghibli, bien évidemment, parle de lui-même, sans besoin d’éloge supplémentaire – demandez aux personnes qui s’y connaissent un minimum et vous verrez une grande partie choisir Ghibli plutôt que Disney comme le studio d’animation par excellence ; pourtant, en plus de 30 ans d’existence, c’est la première fois qu’il produit une série. Après de vaines négociations entre Hayao Miyazaki et Astrid Lindgren, durant les années 70, autour d’un droit d’adaptation de ses œuvres, voilà enfin une opportunité de croisement de deux univers si vastes, qui ont marqué l’imaginaire des enfants (aussi bien que des adultes) à travers le monde entier depuis des décennies.
En ce qui concerne le réalisateur, on ressent ici un élan de nostalgie – on n’a pas entendu le nom Miyazaki associé à une nouvelle œuvre depuis 2013 quand, avec son dernier long-métrage Le Vent se lève, Hayao a annoncé qu’il se concentrerait exclusivement sur le musée Ghibli et quelques courts-métrages. Et même s’il s’agit ici de Miyazaki junior et non du fameux réalisateur de nos dessins animés préférés, on ne peut s’empêcher de se réchauffer le cœur à l’espoir de revoir au moins en partie cet esprit captivant que possédaient les films de son père.
Goro Miyazaki, encore peu reconnu, a pour sa part réalisé deux longs-métrages d’animation : Les Contes de Terremer (2006) et La Colline aux coquelicots (2011). Ces œuvres, sûrement pas encore au niveau de celles de son père, méritent tout de même d’être prises au sérieux. Ronya, fille de brigand laisse espérer un résultat plutôt intéressant, malgré une certaine méfiance.
Pourtant, cette méfiance croît lorsqu’on se rappelle que Studio Ghibli n’a fait que coproduire cette série et que le principal auteur reste Polygon, soit un studio d’animation 3D. Au moment où je venais juste de découvrir l’existence de ce projet, une amie se plaignait que l’animation avait un look beaucoup trop occidental pour Ghibli, ce qui s’explique tout de suite par l’utilisation de cette technique contemporaine qu’est la 3D. On n’a pas besoin d’être un expert pour savoir que Ghibli et 3D, ça colle pas. Tout en ayant des créatures toujours aussi originales, des paysages flamboyants et une musique qui semble venue d’un autre monde, le visuel général de Ronya, et surtout de ses personnages humains, manquent de l’expressivité qui distinguait toujours les animés de Ghibli de millions d’autres. En effet, on retrouve une plus grande ressemblance visuelle avec le jeu vidéo de Goro Miyazaki Ni No Kuni qu’avec Le voyage de Chihiro ou encore Le Châteu dans le ciel.
Cet aspect visuel digital est presque toujours un succès pour un jeu vidéo, aussi bien que pour des séries comme The Clone Wars ou une des parties de Ghost In The Shell, mais jamais pour un dessin animé signé par Ghibli et quelqu’un du nom de Miyazaki.
Mais, comme on n’aime pas cette position de “C’était mieux avant!!” et parce qu’on a la flemme de créer une pétition pour que Hayao revienne, on reste optimiste. Après tout, on n’a vu qu’une bande-annonce de deux minutes. En attendant le reste, revoyons nos classiques préférés de Ghibli, et l’opening de Ronya, qui est plutôt chouette.
Gvantsa Tsintskaladze