Le 1er Janvier, Sherlock sacrifiait à la tradition britannique de l’épisode de Noël et diffusait The Abominable Bride. L’épisode était annoncé comme un interlude entre la saison 3 et la saison 4, et se situait dans un cadre très particulier : l’époque victorienne, où se déroule l’œuvre originale de Arthur Conan Doyle. Les créateurs de la série, Steven Moffat et Mark Gatiss avaient ainsi décidé de prendre à contre-pied le parti pris de la série BBC, à savoir la transposition des aventures du célèbre détective au XXIe siècle. Verdict ?
L’épisode commence comme un reboot victorien – les premières minutes sont ainsi une transposition directe du tout premier épisode de la série dans ce nouveau cadre – mais très vite, une toute nouvelle enquête débute. Néanmoins, contrairement à ce qu’on aurait pu penser, l’intrigue de cet épisode ne peut se concevoir en dehors du reste de la série. Il multiplie ainsi les clins d’œil, du plus subtil au plus appuyé à l’ensemble de l’univers construit dans les saisons précédentes. Ceux-ci se rajoutent aux rappels de l’œuvre originale de Arthur Conan Doyle, plus présents que jamais. Cette accumulation des références se révèle étouffante par moment – on a parfois la désagréable impression que le scénariste se contente d’empiler les clins d’œil et l’auto-citation. Paradoxalement, c’est lorsque l’épisode prend le plus de recul avec son cadre – lorsqu’il souligne la misogynie de l’époque par exemple, notamment à travers le traitement que John Watson fait des « personnages » féminins, et en premier lieu sa femme – qu’il se révèle le plus intéressant.
Visuellement, la série reste de très haut niveau. Le soin accordé aux décors, aux mises en scène, n’est plus à prouver. On peut néanmoins considérer que le réalisateur en a un peu trop fait son parti pris, et noter quelques lourdeurs, notamment en ce qui concerne les transitions d’une scène à l’autre, défaut déjà notable dans la saison 3. Le décor victorien se teinte d’une nuance gothique – l’hypothèse du surnaturel, qui surgit dans l’intrigue à plusieurs reprises, est ainsi très présente visuellement. On repense d’emblée à une autre adaptation de Sherlock Holmes – celle de Guy Ritchie sortie en 2009. Pas assez original, peut être.
Cet épisode reste globalement de la télévision de bonne qualité, malgré les réserves émises plus haut. Il confirme la vocation de la série à s’engouffrer dans une voie de plus en plus « méta » et à creuser encore davantage les méandres de la psyché de son personnage principal. Objectif ambitieux, mais qui tend à rendre la série de plus en plus confuse et déstabilisante pour un spectateur qui attendrait avant tout de Sherlock une solide intrigue policière, bien menée et filmée, et servie par un casting très honorable.
Estelle Naud